TW : Hôpital, sang, tentative de suicide, violence sur enfant.
Ma normalité est ici, dans les murs froids et vides, les couloirs trop éclairé, la petite fenêtre qui s'ouvre à peine, ma chambre devenue mon espace sécurisé et sécurisant, mes interactions avec Z. et L. que j'ai rencontrées ici. Le jaune et le blanc délavé se mélangeant aux bruits de craquement des lumières, assise face à la lumière de la fenêtre. Stylo en main qui avance sans que je lui demande. Le sol froid, la pièce trop chauffée. Le monde n'existe que jusqu'aux portes de l'hôpital.
C'est comme si toute ma vie était là, cette vie parallèle dans laquelle je suis née le 24/03/2024.
Ma Vie d'avant est en pause, en lévitation dans un instant bloqué dans le temps et je dois choisir quand et si je la laisse sortir.
Le dehors me fait peur. Je n'ai pas envie de l'après mais je ne fait qu'y penser. Je n'ai pas envie de courir pour rattraper le retard que j'ai sur le monde qui continue de tourner pendant que je suis là. Je veux quelque chose de nouveau.
Je ressens un manque. La vie d'après ici me manque déjà. Je ne veux plus de ma vie d'avant. Je veux en garder les joies, l'adelphité, mes passions (re)découverte, tout ce qui me rend heureuse mais ne me tue pas à petit feu... Je ne veux plus exister comme je l'ai fait durant ces 27 ans.
Je veux une autre vie, où je regarde droit dans les yeux l'enfant traumatisé qui me suit dans l'ombre. Que j'ai traîné dans la boue, les graviers, les douleurs. Je veux le regarder et lui dire pardon. Pardon de l'avoir attaché et empêché de parler pendant tout ce temps.
Je veux laisser cet enfant couvert de coups me guider. Je veux lui laisser de la place, le laisser s'exprimer. Écouter dans le silence son sang tomber sur le sol. Sang que j'ai participé à sortir de son corps toutes ces années. Je suis terrifiée à l'idée de croiser son regard et y voir la douleur que je lui délègue depuis des années, y voir les coups de couteaux qu'il a pris à ma place, seul, en silence, sans se plaindre.
Ce 24 mars, il a prit ma place, il a décidé que s'en était trop, qu'il a trop souffert sans même que je daigne le regarder une fois. Que la souffrance trop longtemps ignorée était devenue trop dur à supporter. Il voulait la délivrance dans la mort. Moi, je me suis battue sans savoir ce qu'il se passait, je ne voulait pas mourir, pas si tôt, pas comme ça.
Mais il (je ?) l'avait décidé, et il fallait m'en empêcher.
Ma normalité est ici, l'après me fait peur, l'avant me terrifie. J'ai besoin d'aide pour apprendre à marcher.